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L’ŒUVRE DE L'ARTISTE GEORGES NOËL VU PAR FABRICE HERGOTT DIRECTEUR DU MAM DE PARIS
Les 31 mars et 1er avril prochains, l’atelier rénové de Georges Noël sera exceptionnellement ouvert aux amateurs, pendant la semaine d’ART PARIS ART FAIR.
A cette occasion, Fabrice Hergott, directeur du Musée d’art moderne de la Ville de Paris, nous fait partager son regard sur cet artiste français, créateur dans les années 1960 d’une écriture picturale originale.
Fabrice Hergott, quel regard portez-vous
sur l’œuvre de Georges Noël ?
J’ai rencontré Georges Noël alors que j’étais conservateur au Centre Pompidou, au tout début des années 1990.
J’étais passé le voir dans l’atelier de la rue Sedaine, et à cette époque, je n’étais pas particulièrement sensible à son travail.
C’est beaucoup plus tard, assez récemment d’ailleurs, que j’ai compris l’importance qu’il avait pu avoir, en me plongeant dans des revues comme L’œil des années 1960.
Je me suis mis à reconsidérer son œuvre car j’ai réalisé qu’il était l’un des rares artistes français de la fin des années 1950 et du début des années 1960 qui possédait une vraie aura internationale, et qu’il était très recherché parmi les peintres européens.
Je ne m’étais pas vraiment rendu compte de cela au moment de notre première rencontre.
C’était quelqu’un d’assez solitaire, et il pouvait paraître un peu isolé. Or en tant que conservateur, on est toujours plutôt sensible à la communication, au bruit qui se forme autour des artistes.
Georges Noël, comme peintre français, n’était pas rattaché à un mouvement artistique particulier de sa période comme le BMPT ou le groupe Supports/Surfaces.
Lorsque je l’avais rencontré, il n’était plus non plus représenté par une galerie. Il était donc un peu difficile de le situer par rapport à l’actualité de l’art contemporain.
Il est vrai que les influences de l’artiste étaient variées : on a parfois comparé sa démarche à celles de Dubuffet et Klee, il a également été inspiré par l’art américain et par les cultures des civilisations archaïques… De quelles figures contemporaines rapprocheriez-vous l’œuvre de Georges Noël ?
Dubuffet certainement, pour son usage de la matière, et Paul Klee également pour certains usages du collage et de l’espace, mais je vois davantage un parallélisme avec l’œuvre de Cy Twombly.
Il me semble que s’il n’y avait pas eu dans les années 1960, cette très brillante construction intellectuelle autour de l’art américain, accompagnée d’une communication qui a eu un effet de « rouleau compresseur », Georges Noël existerait probablement de manière équivalente à un artiste comme Cy Twombly aujourd’hui. On voit que c’est une œuvre qui a été instruite, très travaillée, et qui s’est nourrie de beaucoup de choses.
Des œuvres de Georges Noël ont été acquises par des collections publiques, notamment en France, par plusieurs FRAC, le FNAC et dernièrement le Centre Pompidou. Est-ce selon vous le signe d’un regain intérêt pour les artistes des années 1960-70 ?
On ne peut pas encore vraiment parler de regain d’intérêt pour l’instant, mais cela va se faire progressivement. Nous sommes actuellement dans une période de redécouverte des années 1960-70 : on réalise aujourd’hui qu’il y a eu pendant ces décennies de très grands artistes qui n’ont pas été vus, ou un peu oubliés, et je pense que Georges Noël fait partie de ces artistes-là, comme également, dans un autre registre, l’artiste polonaise Alina Szapocznikow, à qui le WIELS a récemment consacré une vaste rétrospective (1).
Ce mouvement de relecture concerne aussi des artistes comme Martin Barré, Bernard Dufour, Etienne-Martin, ou encore Eugène Leroy. Dans cette scène française figurent des artistes qui seront bientôt considérés comme des artistes majeurs, j’en suis persuadé.
> Télécharger le dossier de presse sur Georges Noël <
(1) Alina Szapocznikow : Sculpture Undone, 1955-1972, du 10 septembre 2011 au 8 janvier 2012 au WIELS, Centre d’Art Contemporain de Bruxelles.