Jean-Xavier Renaud, investi les ateliers et l'espace d'exposition de URDLA, Villeurbanne, du 2 avril au 21 mai 2022. Dans cette exposition, les paysages périurbains font office de décor pour ce carnaval où défilent élus locaux et personnalités publiques.
URDLA est un atelier d’estampe, une galerie d’art et une unité d’édition. Chaque année, URDLA sélectionne des artistes et les invite en résidence. Ces artistes, d’origines, d’esthétiques et de générations diverses, ont ainsi l’opportunité de pratiquer l’estampe originale grâce au matériel et au personnel mis à leur disposition.
Installée à Villeurbanne dans un édifice de près de 1 000 mètres carrés, URDLA réalise un travail de mise en valeur et de conservation d’un savoir-faire artisanal, depuis sa création en 1978.
«Karneval» ramasse à la fois les préoccupations qui nourrissent la vie et l’œuvre de Jean-Xavier Renaud et annonce le déploiement de l’exposition. La langue allemande du titre sonne en écho aux origines lorraines de l’artiste et préfigure les renversements, les caricatures, les traits grossis, les sauts de puces d’une culture à l’autre, d’une langue à l’autre que les peintures, les aquarelles, les dessins et les lithographies portent devant les yeux des regardeurs à la manière d’une parade ou d’une nef des fous.
Ainsi JxR s’inscrit-il dans cette tradition, qui lui vaudra d’être surnommé un temps Diogène de Woippy, de ceux qui portent sur la scène sociale les folies du monde.
Très tôt dans l’histoire de l’estampe les peintres qui magnifiaient la puissance religieuse et politique ont choisi les feuillets imprimés, circulant de mains en mains, pour mettre en image les souffrances et les misères, pour soutenir des révoltes. Que l’on songe à Urs Graf & Albrecht Dürer, à Jacques Callot & Franciscode Goya, à Honoré Daumier mais aussi Georg Grosz et Otto Dix.
Le visiteur de notre karneval trouvera au-delà des liens intellectuels les rimes plastiques, les proximités de langage de JxR avec ces derniers.
Le carnaval, c’est le pouvoir cul par dessus-tête. Le premier renversement, JxR le produit en révélant ce qui s’oublie dans la parole en figurant de manière littérale des clichés, des calembours, des jeux de mots du discours courant. C’est l’un des points de départ de ses travaux dont on trouve quelques traces aujourd’hui.
Quelle est la figure de «cul par dessus tête» ? D’«Isis » ? Dès lors tout cliché, toute image du quotidien, de l’entourage, se prête à ce détricotage langagier et imaginaire.
La production d’une image de soi publiée à l’adresse d’un monde sans regard insinue aujourd’hui les recoins de la vie subjective : la vie privée, familiale et sexuelle mais aussi, bien entendu la vie publique, spécifiquement politique. Celles et ceux qui décident de s’engager pour le bien de la cité, aux services d’idéaux doivent s’y soumettre.
Métropoles ou villes, départements et régions propulsent ainsi jusque sur les écrans jadis réservés à la publicité commerciale une image qui soulève l’envie en affichant un idéal. JxR travaille du lieu où il vit, le plateau d’Hauteville dans l’Ain. Aussi applique-t-il son regard à ce qui l’entoure, les paysages, le voisinage et les représentants du pouvoir en place.
Un territoire fut-il rural est aujourd’hui effracté et parsemé des bulles de la mondialisation Internet. Aux côtés d’édiles locaux apparaissent des influenceuses, des images d’intérieurs attrapés sur la toile. Caricaturés, grossis, ils ne s’affichent pas en écran mais constituent des fenêtres, dans lesquelles apparaissent des liens oubliés du local au mondial,du privé et du public.
Aux antipodes des chromospublicitaires, les images de JxR sédimentent le temps dans une proximité et une intimité du peintre et de son modèle.
Saisissez notre invitation au carnaval, embarquez sur la nef.