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À la Loo & Lou Gallery, Paris, exposition "Cœur du temps" par l'artiste peintre Tana Borissova
La galerie Loo & Lou présente une sélection de peintures de l’artiste Tana Borissova (née en 1978 à Sofia, vit et travaille à Paris depuis 1997).
Pour cette troisième collaboration avec la peintre Tana Borissova, la Loo & Lou présente du 31 mai au 27 juillet 2024 l'exposition "Cœur du Temps".
"Le cœur du temps garde quelque chose de l'état naissant de tout", Maria Zambrano.
"Dans la continuité des éclosions de peinture propres à l'artiste, Tana Borissova approfondit sa recherche en explorant le jeu entre surface et profondeur, débordement et retenue. À l'origine de sa dernière série git un arbre abattu, inspirant sa recherche dans laquelle les couches de peinture et la lumière se métamorphosent sans cesse. "J’ai voulu peindre la présence de l’arbre – corps, entrailles, souffle – et que sa présence intense dissolve la figure représentée. J’ai voulu rendre présents ses rythmes et formes multiples, ses passages et creux intimes, singuliers, débordant, brisant les contours fixes."
C’est un mystère qui déroule ses points d’interrogation dans le train ordinaire de nos existences et qui se célèbre dans l’atelier de Tana Borissova. Mystère crispant, exaspérant pour l’entendement ; mystère exaltant, source d’inépuisables et vives joies pour les autres facultés – spirituelles et sensorielles tout ensemble.
En un mot : comment de la matière et de ses propriétés inertes (étendue, dureté ou docilité plastique, consistance ou ténuité) se dégage la vie ? Ou, mieux dit : comment ce qui est soumis aux nécessités des lois physiques qu’est la matière s’éveille-t-il à la vie – pense-t-il – sent-il – échappe-t-il à la retombée de la pesanteur ?
Ces passagers de ma ligne de métro, ces couleurs sur les toiles de Tana Borissova : pourquoi ne se résument-ils pas, les uns comme les autres, au seul assemblage de molécules, de tendons et de pigments qui les constituent ? La réponse, s’il y en a une, ne nous pas appartient pas.
Mais rien n’empêche, comme et avec Tana Borissova, d’avancer un peu au coeur du mystère. Voici un arbre : une section d’écorce et de bois ; voici des couleurs (des bleus plus ou moins transis de lumière, des ocres qui s’acheminent plus ou moins vers le point d’incandescence et de fusion) ; voici les toiles de l’exposition. Et voici que "voici" ne suffit pas ; qu’il y a toujours plus à voir que l’ici de ce "voici".
Le cœur des choses : là où l’uniformité superficielle des tissus, dermes, écorces est rompue, là où il y a complication de formes, miroitement de nuances, indéfiniment regardables, caressables, interrogeables. Là où la matière organique revêt la variété du vivant.
Ainsi, chez Tana Borissova, l’infinie cartographie des paysages intérieurs qui, tel ces mondes qu’abritent les gouttes d’eau des rivières, dessinent la topographie (la géologie, la géographie, on ne sait trop comment dire) de l’être végétal que fouillent et refouillent les tableaux.
Le cœur des choses : là où l’art recherche les composantes premières dont l’assemblage suscite le vivant. Ces composantes mêmes que révèlent les variations chromatiques de Tana Borissova, indéfiniment souples mais toujours raccordées au quadruple noyau de toute chose, toujours suggestives des tonalités des quatre éléments : teintes de terre, d’eau, de feu, de ciel.
Car Tana Borissova est de la lignée des grands "décomposeurs" de ceux qui, lumière, terre, roches, ne peuvent voir que sous les espèces de la multiplicité –, qu’il s’agisse de Turner, bien sûr, mais aussi du Giuseppe De Nittis du Vésuve, ou encore du Courbet de la caverne des Géants, comme des paysages de Dora Maar.
Je ne serai jamais tel autre voyageur dans le métro, mais je peux le connaître ; je ne serai jamais tel tableau de Tana Borissova, mais ses courants, ses flux, m’emportent ; je suis pris dans l’élan de ce surgissement, dans l’impétuosité de la vie. Poussées, jets : telle est l’impression dynamique que font les toiles de Tana Borissova. Souffle vital, pulsation cardiaque, flot du sang dans les artères, de la sève dans le végétal, coulée du temps…
Tout cela, c’est de l’ordre du mouvement, de l’émotion. Car l’arbre de Tana Borissova, comme sa peinture, sent, ressent. Magnifique mystère, devant lequel il ne reste plus qu’à se taire. Et à regarder." Damien