L’ouverture d’une nouvelle boutique Cartier se fait toujours dans une forme de discrétion chic. C’est peut-être plus encore plus vrai dans la cité lombarde où le spectaculaire et l’opulent ne se laissent découvrir qu’avec mesure. La réalisation de l’agence Moinard Bétaille sur la Via Montenapoleone, respecte au plus haut point les principes de la marque : être 100% soi et 100% local.

 

Sommes-nous au théâtre ? En effet, de grands rideaux toute hauteur, encadrant la porte d’entrée, tombent des cintres, et accrochés aux murs de bois verni, des étagères graciles accueillent des joyaux de maroquinerie, inaccessibles, là juste pour la beauté de la scène, acteurs immobiles. Le décor et le rapport d’échelle jouent leur rôle à la perfection. Intérieur, extérieur : l’illusion théâtrale de la porte en fausse perspective nous dit que nous entrons dans un autre monde.

Sommes-nous dans un palais milanais, tout simplement, sur ses trois niveaux, jaloux de son intimité et de sa cour intérieure ?

Les mosaïques du sol en traditionnelle calade de galets s’assemblent doucement sous les pieds et quand le sol se lisse, les voilà tissées sur le tapis. Les quatre piliers massifs semblent traverser le plafond en trompe l’œil.

 

De part et d’autre d’un comptoir cenral au piètement en larges pétales dorés, finement ciselés, les espaces déclinent des ambiances distinctes.

 

À gauche, le bois du plafond interrompu par des fentes lumineuses rappelle la pergola. Le paravent précieux de mélèze brillant serpente et enveloppe l’espace comme un ruban. Les tons sont chauds, rassurants comme dans un club accueillant.

 

À droite, c’est une explosion de jaune où règne le sycomore dans lequel s’incrustent des inserts blancs et rouges de design italien, intemporel et moderne à la fois, délimitant des espaces singuliers. Ici, la mosaïque grimpe au mur et sert de terrain de jeu à une panthère qui s’y dessine.

 

Le palais a deux étages : attirant regard et le faisant se porter vers le haut, un escalier spectaculaire fait bloc avec l’ascenseur, glissant dans son fourreau transparent de verre et de bois, formant un ensemble majestueux qui relie les trois mondes. Une expérience à part entière que l’ascension !

 

Les marches de marbre rappellent les blocs bruts de la carrière dont ils proviennent. Aux murs dans la montée, même notion de blocs massifs de taille inégale et pourtant parfaitement ajustés, comme sculptés d’un drapé sur lequel des feuilles de lierre, ciselées en relief, s’accrochent, ici en bosse, là en creux.

 

La panthère, elle aussi sculptée, joue malicieusement dans le décor, comme si elle donnait rendez-vous dans le jardin suspendu, tout en haut.

 

 

Le premier étage calme le jeu : ici règne le diamant. Les couleurs sont poudrées, doucement brillantes, les lustres font pleuvoir des petites lumières. Patines, marqueterie de paille, application de verre : les matières sont précieuses et agrippent subtilement le jour. Dans le salon privatif, le duo Moinard Bétaille joue à fond les codes de l’architecture milanaise : le dessin tout en stries légères du plafond, l’ébrasement des fenêtres en pierre lui donnent sa typicité. Et en focus, une vision futuriste fait surgir la panthère dans un environnement fantastique célébrant le Milan d’aujourd’hui comme l’aurait fait Piranèse au XVIIIème siècle.