Moins de voyages, moins de foires : la nouvelle donne oblige les galeries d’art contempo-rain à repenser leur visibilité en dehors de leur territoire. Le directeur de l’antenne bruxelloise de la galerie Templon, assisté par les développeurs d’Arteïa, analyse les bonnes pratiques de l’expérience des viewing room.
La galerie Templon n’a pas attendu le confinement pour lancer sa viewing room. Sans doute une des meilleures du genre. Quel a été le déclic ?
Mathieu Templon : En ouvrant une antenne à Bruxelles, en 2013, la Galerie Templon répondait déjà au besoin d’élargir l’accès aux œuvres. Nombre de nos artistes n’étaient pas représentés en Belgique et il s’agissait ainsi de les rapprocher des collectionneurs outre Quiévrain. En juin 2019, lorsque j’ai imaginé pour Bruxelles une exposition commune de cinq artistes de la galerie, sur le thème du dessin, j’ai cherché le moyen d’en amplifier l’impact.
En créant drawingroom.templon.com, j’ai pu montrer la manière dont Omar Ba, Oda Jaune, Abdelkader Benchamma, Chiharu Shiota et Norbert Bisky s’étaient approprié les murs. Cette captation était d’autant plus précieuse que l’exposition « From the paper to the wall » reposait sur la production d’œuvres éphémères.
Au-delà des clients connus et du public habituel de la galerie Templon, quelles étaient les cibles ?
Mathieu Templon : Notre cible, c’est toujours le plus grand nombre. J’ai évidemment pensé aux résidents de Belgique qui très souvent partent au soleil en juillet et en août, mais aussi au grand public.
Grâce à Arteïa, inventeur de solutions informatiques pour le monde de l’Art, et à ses développeurs, j’ai voulu une viewing room très accessible, sans compétence technique requise et sans mot de passe. Une vue générale du lieu d’exposition, des œuvres cliquables, des informations associées sur la pièce et l’artiste et, enfin, un onglet permettant de demander des renseignements.
J’ai voulu me garder de la tentation de la sophistication, qui exclue les novices, ainsi que du désir de capter des données, qui ronge notre vie privée.
Le résultat a été assez satisfaisant pour que la Galerie Templon systématise le principe des viewing rooms.
Mathieu Templon : L’investissement était raisonnable, de l’ordre de quelques milliers d’euros, et nous n’avons pas cherché à calculer le coût unitaire de chaque visiteur. Ce que nous avons mesuré en revanche, c’est la satisfaction des artistes, heureux de pouvoir montrer leur travail en renvoyant sur drawingroom.templon.com.
Et celle des visiteurs, dont certains ont fait le déplacement jusqu’à la galerie pour voir de plus près ce que la visite virtuelle leur avait donné en aperçu. Et pour acheter des œuvres aussi. Cela nous a incité à renouveler l’initiative.
La création de viewing rooms pour les expositions rendues impossibles par le confinement avait-elle un objectif commercial plus précis ?
Mathieu Templon : Les expositions de Norbert Bisky et Billie Zangewa, vernies le 13 mars 2020, n’avaient pu être ouvertes qu’une seule journée lorsque le confinement a été imposé.
Il se trouve que la plupart des œuvres de ces deux artistes avaient été vendues, mais la galerie avait à cœur de les montrer. Depuis mon appartement de Bruxelles, j’ai travaillé avec les développeurs d’Arteia et l’équipe de la galerie pour qu’en dix jours, ces deux expositions et celle de Jim Dine à Bruxelles soient accessibles online.
Grâce à une communication par voie de newsletter et notre compte Instagram, nous avons reçu plus de mille visites dès la première journée. Et des centaines de demandes d’informations, qui étendaient notre zone de chalandise au monde entier.
Cela nous a permis de nouer des contacts avec de nouveaux collectionneurs et même de réaliser plusieurs ventes ces derniers mois.
Au terme de ces premières expériences, comment concevez-vous la complémentarité entre l’expérience de l’œuvre via le digital et en « présentiel » ?
Mathieu Templon : La clé, c’est la simplicité. Un visiteur repère un artiste dans un musée ou une exposition. Il tape son nom sur Instagram ou sur YouTube, qui sont utilisés comme des moteurs de recherche au même titre que Google. En un clic, il bascule sur le site de la galerie et sa viewing room. Un formulaire permet d’aller au-delà des quelques informations succinctes.
La restriction des voyages et le ralentissement du rythme des foires ne bouleversent pas le mar-ché de l’art, mais obligent les galeries à opérer une révolution pour affirmer leur visibilité en dehors de leur territoire.
Déjà, nous échangions par mail avec des personnes que nous connaissions ou qui connaissaient nos artistes. Il faut désormais aller chercher d’autres publics, plus jeunes notamment. Le milieu de l’art, comparé à la musique ou au cinéma, était en retard dans sa transformation digitale. La crise du Covid-19 ne fait qu’accélérer un processus à l’œuvre.
Cet investissement numérique vous dispensent-t-ils de communiquer sur les médias « cla-siques » ?
Mathieu Templon : Si la galerie Templon continue d’annoncer dans la presse spécialisée, ce n’est pas seulement pour la soutenir : ses lecteurs sont nos collectionneurs !
Il faut juger l’efficacité plutôt que la mode : l’impact d’une publicité dans Sabato n’a pas d’équivalent pour signaler l’exposition de Jan Van Imschoot à la communauté flamande de Belgique.
Et pour Jan Fabre, dont les œuvres et le nom sont identifiés, l’affichage à Bruxelles a été un succès. Nous avons noué plus de cinquante ans d’histoire avec nos artistes et nos collectionneurs, pas question de tout effacer !
Propos recueillis par Daniel Bernard
En pleine préparation de l’édition 2021, qui se tiendra du 8 au 11 avril, le directeur d’Art Paris se réjouit d’accueillir plusieurs galeries internationales d’importance. Profitant de l’attraction nouvelle de Paris, Guillaume Piens fait subtilement évoluer le positionnement de l’événement, en valorisant l’image de « foire régionale » tout en renouant avec la pointe avancée de l’art contemporain.
Selon vous, pourquoi Art Paris enregistre-t-elle l’inscription de galeries prestigieuses, qui snobaient votre foire ?
Guillaume Piens : Il y a eu tout d’abord le succès de l’édition de septembre 2020, qualifié d’«insolent » par le Journal des Arts. Nous avons montré qu’il était possible d’organiser une grande foire par temps de pandémie, en tenant contre vents et marées. Nous récoltons les fruits de cette ténacité et ...
Lire la suite >>>Son exposition personnelle au Centre Matmut pour les arts, en Normandie, a temporairement fermé ses portes en raison de la pandémie. Qu’importe, l’artiste qui se joue de la photo entretient un lien de complicité avec ses followers, via son compte Instagram. Une visibilité autonome, construite avec méthode, qui lui servira pour trouver une galerie.
Votre premier post sur Instagram date du 30 octobre 2015. Comment avez-vous deviné l’importance de ce réseau social, dans le monde de l’art ?
Sabine Pigalle : Je n’ai rien deviné du tout ! A l’époque, j’alimentais ma page Facebook, ouverte en 2008 et je ne voyais pas l’intérêt de migrer vers un autre réseau social.
Avant d’en prendre conscience, j’ai observé, j’ai tâtonné. Mes premiers posts parlaient surtout de la Normandie où je vis, de mes amis et des ...
Lire la suite >>>Pour sa première action de mécénat, la collectionneuse Sophie Javary a choisi une œuvre d’Agnès Thurnauer. En permettant l’installation des "Matrices/Chromatiques" au musée de l’Orangerie, pour dix ans, elle offre une visibilité à une femme artiste et, au public, une réflexion contemporaine sur le langage.
En pleine crise sanitaire et économique, vous venez de financer une importante pièce d’Agnès Thurnauer pour le musée de l’Orangerie. Quel déclic a fait, de la collectionneuse que vous étiez, une mécène ?
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Lire la suite >>>Depuis 20 ans, les œuvres de Philippe Pastor affichent, comme une obsession, la responsabilité individuelle de chaque homme dans la destruction de la nature. Série après série, ses toiles, sculptures et installations empruntent au vivant pour appeler à la prise de conscience.
Son esthétique est un outil au service d’une cause universelle. Paradoxalement, le sentiment d’intemporalité créé par l’artiste monégasque est un signal d’urgence, un appel à l’action.
Vous êtes autodidacte et avez commencé votre pratique artistique sur le tard. Quel est l’élément marquant qui vous a poussé à peindre ?
PHILIPPE PASTOR : Un jour, j’ai décidé de changer mes habitudes et mes fréquentations, de vivre dans d’autres lieux pour mener une autre vie. Alors la peinture est venue, d’elle-même.
Lire la suite >>>Par FRANÇOIS BLANC
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Par RAPHAËL TURCAT
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