AU TEMPS DU CORONAVIRUS, COMMUNIC'ART DONNE LA PAROLE À SES CLIENTS.
En cette période de confinement, quelles sont les actions que l’Institut des Cultures d’Islam mène pour poursuivre ses activités ?
Stéphanie Chazalon : Cette étrange période est l’occasion de faire avancer les projets mis de côté par manque de temps, d’évaluer nos pratiques et de nous renouveler collectivement. La priorité a d’abord été d’organiser le travail de l’équipe à distance, en apprivoisant de nouveaux outils de communication interne et en réfléchissant ensemble à la manière de faire vivre en ligne notre programmation.
Nos activités sont aujourd’hui principalement liées à notre exposition temporaire « Croyances, faire et défaire l’invisible », qui a démarré le 11 mars, juste avant le confinement. Nous en proposons une visite virtuelle conçue comme une déambulation à travers nos espaces, complétée par deux activités pour le jeune public : un livret jeux pour découvrir les œuvres en famille et la fabrication d’un livre de recettes magiques.
Nous diffusons également chaque mardi des contenus inédits pour les grands et les petits par le biais de notre lettre d’information qui rassemble des interviews d’artistes et d’universitaires, un dossier thématique à partir d’une œuvre, une séquence « archives » pour revenir sur les temps forts de l’ICI ces dernières années, la possibilité de visionner un film qui devait être projeté dans nos murs, etc.
Et enfin, nous avons décidé de prolonger l’exposition en septembre et en octobre afin de reprogrammer une partie des conférences, films, spectacles et concerts initialement prévus jusqu’à l’été.
En quoi est-ce important pour vous de maintenir le lien avec vos communautés et vos publics ?
SC : La mission de l’ICI est de montrer la diversité des cultures d’islam dans le monde et leur dynamisme dans la création contemporaine. Nous voulions faire connaître le travail des artistes photographes et vidéastes de « Croyances, faire et défaire l’invisible » qui, pour certains, n’a encore jamais été montré en France ou bien qui a été réalisé spécialement pour l’exposition.
Il nous a donc semblé évident de proposer de découvrir autrement ces œuvres et de donner la parole aux artistes. Parce que la séquence est compliquée pour tout le monde, chacun doit faire sa part pour être au rendez-vous d’une forme de cohésion nationale. En gardant le contact par le biais de notre site et des réseaux sociaux, en nous adaptant pour rendre accessible notre offre artistique et culturelle à nos publics, nous voulons être à leurs côtés et participer à l’effort général.
Au-delà du digital, nous sommes à l’écoute de nos partenaires locaux, l’ancrage territorial de l’ICI dans le quartier de la Goutte d’Or à Paris étant un engagement fort de notre établissement. Nous faisons évoluer nos actions de proximité, notamment en direction du champ social, pour en assurer autant que faire se peut la continuité.
Le projet photographique « Histoires de famille » que nous menons avec le café itinérant enfants/parents Home Sweet Mômes pour renforcer les liens intergénérationnels est, par exemple, transformé en BD du confinement à partir des témoignages croisés des familles et des résidents de l’EHPAD du quartier. Par ailleurs, l’association La Table ouverte, qui gère notre restaurant, prépare chaque jour à l’ICI entre 100 et 200 repas qu’elle distribue gratuitement aux personnes isolées du quartier : c’est un magnifique exemple de la solidarité à l’œuvre en réponse à des situations parfois dramatiques. Et une leçon d’humilité.
Comment considérez-vous le rôle de la culture et de l’art dans ce contexte de crise sanitaire, de confinement ?
SC : Parmi les nombreux effets collatéraux du confinement, on constate une augmentation très préoccupante des inégalités et des violences, en particulier contre les femmes. L’art et la culture sont hélas impuissants face à ces situations prioritaires, comme sur le plan sanitaire. Il s’agit malgré tout d’essayer d’être utile là où on peut l’être, en accompagnant les personnes et les familles qui vont chercher une forme de soutien pour faire face à la solitude, à l’angoisse, ou simplement à l’ennui, ou une source d’inspiration pour s’ouvrir à de nouveaux horizons, se remettre en question, se réinventer.
L’ouverture sur les autres et sur le monde peut aider à donner du sens à ces moments où le temps est comme suspendu, où la tendance pourrait être au repli sur soi. Elle permet de résister au récit d’enfermement qui est devenu notre quotidien. Le secteur se mobilise pour que tous ceux qui sont connectés puissent bénéficier d’une offre pléthorique et les artistes font preuve d’une belle générosité en multipliant les initiatives, comme cette conteuse qui enchante tous les jours ses voisins avec une nouvelle histoire depuis la cage d’escalier de son immeuble à Pau. Plus que jamais, l’art et de la culture émancipent et créent du lien.
Quelles leçons tirez-vous de cette expérience inédite et quel impact aura-t-elle selon vous dans le secteur de la culture ?
SC : Il semble prématuré de faire un bilan, mais je veux retenir avec optimisme l’élan de solidarité et la capacité d’adaptation de notre société. Le sujet de « l’après » est sur toutes les lèvres : espérons que la prise de conscience suscitée par cette crise sur les profonds dysfonctionnements de notre modèle de développement, si souvent dénoncés par les artistes, se traduise enfin par un changement de système.
Le secteur culturel, dont l’équilibre économique est d’ordinaire si difficile, est aujourd’hui terriblement fragilisé. S’il a su se mobiliser et, dans une certaine mesure, s’adapter lui aussi au contexte, la réflexion sur les nouvelles formes de diffusion des œuvres et des savoirs doit être poussée plus loin et portée collectivement, en tenant compte du fait qu’il n’est pas toujours possible, ni évidemment souhaitable, de proposer une version dématérialisée de la culture.
La fermeture des musées, des salles de spectacles, des librairies, des bibliothèques ou des tiers-lieux et l’annulation en cascade des festivals nous rappellent l’importance de garantir sur le long terme la pérennité de cette offre artistique et culturelle dans toute sa richesse et sa diversité, et de la rendre accessible à tous.
Cettre tribune est parue dans Le Monde le 28 septembre 2024.
Pour une gouvernance mondiale des œuvres d’art et dépasser le dilemme des restitutions
Le débat sur la restitution des œuvres d’art, cristallisé par le rapport Sarr-Savoy en 2018, reste marqué par des positions extrêmes : d’un côté, la revendication de restitutions massives au nom des spoliations coloniales ; de l’autre, la défense rigide des collections occidentales comme trésors universels. Face à cette impasse, il est urgent de réinventer une nouvelle forme de gouvernance culturelle, fondée sur le partage et la coopération internationale.
Lire la suite >>>Pour renforcer l’attractivité de l’Ecole Nationale des Beaux-Arts à Paris, le nouveau directeur encourage les enseignements non artistiques. Avec la participation financière d’entreprises privées, il a également intégré de nouveaux modules de formation centrés sur les questions de société les plus brulantes.
Après une succession de crises, l’Ecole Nationale des Beaux-Arts vit un certain calme. Comment mesurez-vous l’amélioration de l’image de l’école, auprès des étudiants et futurs étudiants ?
Jean de Loisy : Les étudiants, les enseignements et la pratique de l’atelier sont la priorité absolue de l’école. Il n’est plus un seul espace qui ne soit à leur disposition, y compris le musée et le centre d’art.
Lire la suite >>>Cette passionnée de parfum, qui a collaboré avec les plus grandes marques, présente à Paris chez PHILLIPS, le projet PROFILE BY : six œuvres olfactives créées par six artistes bien connus des collectionneurs, Adel Abdessemed, Daniel Firman, Ori Gersht, Hubert Le Gall, Pablo Reinoso et Joana Vasconcelos.
Diane Thalheimer-Krief analyse ici l’intérêt croissant pour l’odorat, un sens négligé dans la culture occidentale rationaliste.
Tout au long de votre parcours, vous avez marié parfum et communication. Quel lien faites-vous entre ces deux univers ?
Diane Thalheimer-Krief : Le parfum coule dans mes veines, une passion depuis mon adolescence… Au-delà de la chimie, j’y trouve une magie. « Styles de femmes, styles de parfums » a été mon sujet de fin d’études au CELSA.
Lire la suite >>>Éric de Chassey, 2020 © Institut national d’histoire de l’art. Photo Jean Picon
Directeur de l’Institut national d’histoire de l’art, Eric de Chassey veille à cibler ses publics : Scientifiques, scolaires ou mécènes sont invités à partager leurs connaissances et leurs curiosités, dans des formats variés. Le prochain Festival sera l’occasion de célébrer les 20 ans de l’Institut avec le grand public.
A l’INHA, que vous dirigez depuis 2016, comment articulez-vous une communication destinée aux historiens de l’art avec l’ouverture au grand public ?
Eric de Chassey : Pour ma part, j’estime que le financement public et notre discipline, par essence, exigent de veiller à une forme de continuité entre l’académie, d’une part, et le grand public, d’autre part. L’histoire de l’art, pour jouer un rôle citoyen, doit être à l’écoute des questions de la société et partager, en retour, le résultat de ses ...
Lire la suite >>>Par FRANÇOIS BLANC
Toutes ses contributions >>>
Par RAPHAËL TURCAT
Toutes ses contributions >>>