À la tête de la galerie 46 St-Paul, Annabelle Audran incarne une nouvelle génération de galeristes pour qui la Côte d’Azur, plus qu’un décor, est un territoire d’expérimentation curatoriale. Elle défend une approche ouverte et exigeante, mêlant artistes émergents et confirmés, art et design, ancrage local et rayonnement international.
Avant d’ouvrir la galerie 46 St-Paul, vous avez dirigé la Fondation CAB. En quoi cette expérience, à la croisée de l’institution et du lieu privé, a-t-elle influencé votre vision du rôle d’une galerie aujourd’hui ?
Annabelle Audran : Cette expérience m’a offert plusieurs perspectives que je m’efforce de perpétuer aujourd’hui au sein de la galerie. Tout d’abord, l’importance de favoriser un dialogue entre artistes émergents et établis.
Au CAB, cette proximité entre les œuvres majeures et les artistes en résidence était non seulement très enrichissante pour ces derniers, mais permettait également aux spectateurs d’établir des liens entre différentes générations artistiques.
Ensuite, la valorisation et l’animation d’un lieu sont essentielles pour offrir des expériences immersives aux collectionneurs. Cela passe par la transgression des frontières, par exemple en mêlant design et art.
L’organisation d’événements contribue également à cette volonté de dynamisme. Nous sommes attentifs aux propositions de collaborations et de partenariats. L’objectif est d’éviter un lieu figé qui se repose sur ses lauriers.
Saint-Paul-de-Vence est un lieu mythique, imprégné d’histoire et de mémoire artistique. Comment une galerie contemporaine comme la vôtre peut-elle dialoguer avec cet héritage tout en affirmant une vision résolument contemporaine ?
La Fondation Maeght et des galeries historiques comme celle de Catherine Issert continuent d’inspirer notre galerie en faisant coexister harmonieusement l’art moderne et contemporain.
Le village, en accueillant des artistes et des amateurs d’art du monde entier, favorise les rencontres et les échanges, créant ainsi une offre artistique crédible auprès des collectionneurs avertis et accessible au grand public.
La galerie 46 St-Paul présente des artistes contemporains exigeants et accessibles. Nos critères de sélection privilégient les artistes ayant des histoires à raconter à travers leurs œuvres, comme la photographe Eleonora Strano, qui témoigne des changements climatiques en mêlant son histoire personnelle à son travail.
D’autres artistes se concentrent sur l’harmonie des couleurs et des formes, dans l’héritage de l’abstraction. J’apprécie la diversité des approches et la possibilité de proposer des œuvres énigmatiques qui invitent le spectateur à s’interroger sur le propos de l’artiste.
La clientèle de Saint-Paul-de-Vence est cosmopolite, avec une forte présence américaine et internationale. Comment adaptez-vous votre médiation à ce public international tout en préservant un ancrage local fort ?
Effectivement, la majorité de nos clients vient de New York et de Los Angeles. Pour répondre à cette clientèle diversifiée, j’ai adopté une stratégie de médiation bilingue, français et anglais, sur notre site web et nos réseaux sociaux.
J’ai également développé des réseaux solides auprès des expatriés résidant sur la Côte d’Azur, notamment des groupes d’amateurs d’art qui fréquentent régulièrement nos vernissages. De nombreux anglophones et Scandinaves possèdent des résidences secondaires à Saint-Paul-de-Vence, Nice, Mougins, Cannes, Monaco, et ils se réjouissent de l’arrivée d’une nouvelle génération de galeries.
Les collectionneurs apprécient la possibilité d’acquérir des œuvres d’artistes reconnus à des prix raisonnables pendant leurs vacances, tout en bénéficiant d’une visibilité accrue grâce à la présence de nos artistes dans la presse spécialisée et les foires d’art reconnues. Ce n’était pas toujours le cas dans le passé, même récent, ce qui contribuait à une image parfois ternie de la Côte d’Azur. Nous sommes déterminés à redorer cette image.
En tant que nouvelle génération de galeristes, nous sommes également des acteurs du monde culturel, ayant déjà collaboré avec de grandes maisons à Paris, Bruxelles et Londres. Notre objectif est de faire rayonner cette région, dont l’histoire est intimement liée à l’art depuis les beaux jours.
Vous mentionnez souvent l’importance pour les galeries du village de « regrouper leurs forces ». Comment envisagez-vous cette collaboration entre acteurs privés et institutions comme la Fondation CAB ou la Fondation Maeght ? À quoi pourrait ressembler un véritable « parcours Saint-Paul » dédié à l’art contemporain ?
Il est naturel que j’aie des liens avec ces lieux et leurs acteurs, car nous partageons de nombreux visiteurs et recommandons nos espaces dès que possible.
Nous pourrions organiser un événement annuel pour conjuguer nos synergies, créer un parcours entre institutions et galeries, et offrir aux visiteurs une expérience transversale mettant en avant la qualité curatoriale qui en résulte.
Le lieu même de la galerie, au cœur du village, est porteur d’une dimension architecturale et sensorielle. Comment cette proximité entre l’art, le patrimoine et le paysage influence-t-elle la scénographie de vos expositions et l’expérience des visiteurs ?
La galerie est idéalement située au cœur du village historique, offrant souvent un bel effet de surprise au public qui découvre un espace qui débute en longueur, où j’aime accrocher des petits moyens formats, des dessins et des gravures des artistes.
Elle se déploie ensuite dans une vaste salle avec une hauteur sous plafond des poutres permettant d’exposer de beaux formats, et une terrasse avec une vue spectaculaire sur les collines voisines et la mer jusqu’au cap d’Antibes. La lumière pénétrante offre une lisibilité optimale des œuvres tout en créant une atmosphère douce et enveloppante.
Enfin, si vous deviez définir votre ambition pour Saint-Paul-de-Vence dans les cinq prochaines années, qu’aimeriez-vous que l’on dise du rôle que 46 St-Paul aura joué dans la redéfinition de la scène artistique du Sud et de l’image culturelle du village ?
Ce rôle allie générosité envers un public diversifié et artistes, en mettant en avant leur travail, tout en maintenant une exigence, un choix critique et une rigueur dans la sélection et la ligne curatoriale, en phase avec le marché de l’art actuel.
FONDATRICE DE L’ASSOCIATION GENIUS LOCI, ET COMMISSAIRE D’EXPOSITION
"Genius Loci, invente des moments exclusifs d'art et d'architecture"
© Damian Noszkowicz
Marion Vignal s’attache, depuis 2021, avec son association Genius Loci, à faire vivre l’architecture comme une œuvre d’art sous forme de déambulations immersives et émotionnelles à travers le prisme de la création contemporaine.
Vous avez fondé l’association Genius Loci en 2021. Quelle était votre ambition ?
J’ai créé Genius Loci, association loi de 1901 à but non lucratif, avec l'ambition de présenter l’architecture comme une œuvre d’art et de la faire dialoguer, vivre, par le biais d’une exposition immersive et animée d’œuvres ayant toutes une résonance avec ce que j’appelle « l’esprit du lieu », le « Genius Loci » en latin.
Lire la suite >>>Responsable de la communication du Musée d’art et d’histoire du judaïsme
"Notre rôle n'est pas de montrer une histoire tragique, mais la permanence de la culture juive à travers les millénaires."
Depuis janvier 2020, Muriel Sassen est la responsable de la communication et des publics du musée d’art et d’histoire du Judaïsme (mahJ).
Dans un contexte géopolitique très sensible, elle décrit la manière dont elle a choisi de communiquer sur l’Histoire et la culture du Judaïsme, sans empiéter sur le territoire du Mémorial de la Shoah.
Lorsque vous êtes arrivée fin 2019 au mahJ, vous êtes-vous heurtée à beaucoup de difficultés pour, au moment du déconfinement, faire revenir les visiteurs ?
Nous avons eu la chance d’avoir une très belle exposition sur l’École de Paris, avec Chagall, Modigliani… sur laquelle nous avions travaillé durant tout le confinement et qui a attiré près de 60.000 visiteurs, malgré les restrictions imposées de jauge.
Nous étions donc prêts dès que les portes se sont ...
Directeur de la communication et de la RSE au Palais de Tokyo
«Le Palais de Tokyo est une institution qui donne la parole aux artistes en les exposant»
Dès son arrivée en 2020 à la direction de la communication du Palais de Tokyo, Mathieu Boncour a élargi son périmètre d’action à la Responsabilité Sociétale des entreprises (RSE).
Sans langue de bois, il explique en quoi ce choix constitue un axe clef de la communication de l’institution, le travail accompli mais aussi les difficultés pour faire la pédagogie des actions concrètes accomplies au quotidien.
Quels étaient les principaux challenges en termes de communication à relever à votre arrivée au Palais de Tokyo, notamment dans le contexte de la réouverture après le premier confinement ?
Mathieu Boncour : Mon premier défi était assez évident. Je suis arrivé le 15 juin ...
Lire la suite >>>Fondateur de Communic'Art
Restitution des œuvres d’art : « Il est urgent de réinventer une nouvelle forme de gouvernance culturelle »
Pour une gouvernance mondiale des œuvres d’art et dépasser le dilemme des restitutions, il est urgent de réinventer une nouvelle forme de gouvernance culturelle.
Le débat sur la restitution des œuvres d’art, cristallisé par le rapport Sarr-Savoy en 2018, reste marqué par des positions extrêmes : d’un côté, la revendication de restitutions massives au nom des spoliations coloniales ; de l’autre, la défense rigide des collections occidentales comme trésors universels.
Face à cette impasse, il est urgent de réinventer une nouvelle forme de gouvernance culturelle, fondée sur le partage et la coopération internationale.
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Restitution des œuvres d’art : « Il est urgent de réinventer une nouvelle forme de gouvernance culturelle »
Par FRANÇOIS BLANC
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"Bien communiquer est un art à forte valeur ajoutée"
Par FRANÇOIS BLANC
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