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Abbaye Royale de Fontevraud, comment communiquer à la fois sur le patrimoine et la création contemporaine
Artistes | Arts | Institutions | Médias
Daniel Bernard | 08.06.2018 | 16:58

Antoine Godbert, directeur général de l'Abbaye Royale de Fontevraud


Daniel Bernard
Journaliste
Biographie >>>
L’Abbaye Royale de Fontevraud est devenue, son histoire ne le supposait pas, un pôle régional de l’art contemporain en France.
Son directeur général Antoine Godbert explique comment se construit, en bord de Loire, la communication d’un modèle artistique original et économiquement équilibré observé jusqu’en Chine.
 
Fontevraud, abbaye royale fondée en 1101 près de Saumur, est labélisée "centre culturel de rencontre". Comment communiquer à la fois sur le patrimoine et sur la création contemporaine ?
 
Antoine Godbert : Aux publics effectivement très divers, Fontevraud adresse un message qui rassemble :  dans le plus grand site monastique d’Europe, venez rencontrer des créateurs d’aujourd’hui. Ce dialogue entre les époques est au fondement du label "centre culturel de rencontre", imaginé en 1975 à l’époque des maisons de la culture et qui s’applique à 19 autres sites en France.
 
Le défi de l’abbaye, c’est de faire entendre sa petite musique à côté de la fanfare des châteaux de la Loire,  dont la communication s’appuie sur la puissance du label Unesco...
 
Antoine Godbert : Fontevraud n’est pas Chambord et ne vise pas un million de visiteurs par an. L’abbaye est évidemment  chargée d’histoire, laquelle commence d’ailleurs bien avant la Renaissance et se poursuit jusqu’au départ du dernier détenu enfermé dans une dépendance, en 1985. Neuf siècles, ce n’est pas rien ! Mais notre communication vise surtout à faire savoir que Fontevraud est un lieu vivant où l’histoire continue de s’écrire. En 2019, sera inauguré le nouveau musée d’art moderne qui accueillera les 900 pièces de la Collection Cligman. A tout ceux que la création contemporaine intéresse,  nous signalons que ce perpétuel renouvellement justifie la découverte et... la redécouverte.
 
Vous avez su éviter le piège, qui serait de s’enfermer dans l’image d’un lieu merveilleux pour le public sénior...
 
Antoine Godbert : En tant que Centre culturel de rencontre, nous avons vocation à offrir aux jeunes une expérience de la création contemporaine. 
 
Fontevraud entretient donc des liens avec les établissements scolaires des environs et avec l’école des Beaux-Arts, mais aussi avec des structures qui proposent à des jeunes en difficulté, scolarisés ou non, une intégration sociale par l’art. Résidence d’artistes, l’abbaye favorise la rencontre de plasticiens et de musiciens, de cinéastes et de chorégraphes, avec leurs publics spécifiques. En outre, ce dialogue des arts, finalement assez rare, attire la curiosité régionale, nationale et même au-delà.
 
Pour conforter ce positionnement original, nous éditons, en plus de notre site internet, un magazine "life style". S’y ajoutent des campagnes d’affichage sur le thème "lieu de beauté et de création", à Angers, Tours et Poitiers, ainsi que dans le métro parisien. 
 
Simultanément, nous avons conçu une communication ciblée pour le public de la musique, de l’art contemporain et du cinéma d’animation.
 
Comment s’articule la promotion du restaurant, depuis que le chef a été étoilé en 2017 ?
 
Antoine Godbert : Fontevraud a pris le parti de lier gastronomie et art. En ce moment même, dans le prieuré qui sert de salle de restaurant, les convives peuvent admirer l’œuvre de Séverine Hubard, une artiste en résidence. 
 
Mais le chef Thibaut Ruggieri s’est pris au jeu : régulièrement, il décortique une œuvre littéraire pour la mettre en bouche, de manière audacieuse mais respectueuse des règles de l’art culinaire.
 
Son étoile Michelin offre à Fontevraud une aura internationale, amplifiée par l’invitation de critiques gastronomiques influents.
 
Pouvez-vous évaluer l'impact respectif d’une publicité dans la presse locale, d’un affichage à Paris et d’une campagne sur Instagram ?
 
Antoine Godbert : De tous les médias, le plus efficace est sans doute le bouche à oreille : nos résidents, tout comme les étudiants aux Beaux-Arts, sont de précieux prescripteurs ! 
 
Plus généralement, les réseaux sociaux se sont surtout avérés efficaces à Nantes et Paris, autour d’événements spécifiques en art contemporain ou en cinéma d’animation. Le syndicat des vins de Saumur, qui sollicite un de nos artistes pour ses bouteilles, n’est pas moins important que tel collectionneur d’art contemporain. Dès lors, pour mobiliser le tissu local, les affichettes régionales et les encarts dans la PQR demeurent pertinents.
 
Comment avez-vous réussi à trouver un écho international ?
 
Antoine Godbert : en 2017, l’abbaye a accueilli physiquement 184 médias dont 40% de l'étranger. Après avoir sollicité des journalistes chinois américains ou espagnols, nous avons mesuré les retombées : 30% de public étranger en 2017 contre 22% l’année précédente. 
 
Avec le Centre de création contemporaine Olivier Debré et le château de Montsoreau, une synergie se met en place. Après l’inauguration des 1200m2 du musée, à la fin du premier semestre 2019, l’attraction de Fontevraud sera plus forte encore. 
 
Par ces messages, à l’étranger comme en France, Fontevraud devrait se stabiliser autour de 250 000 visites annuelles (contre 193 458 en 2017, dont un quart en provenance de l’étranger), et surtout accroître la part des recettes issues du restaurant, de l’hôtel et de la boutique. Ce modèle est doublement vertueux : sans perdre de vue l’équilibre comptable, nous offrons aux artistes une quiétude propice à inscrire leur création dans une continuité historique et artistique. 
 
Deux lieux en Chine s’inspirent d’ailleurs des centres culturels de rencontre et d’autres se préparent en Inde, aux États-Unis et en Afrique, qui formeront demain un réseau international qui sera un plus pour l’abbaye. 

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Daniel Bernard
Journaliste
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Bien avant la crise du coronavirus, le compte Instagram @jerrygogosian s’était imposé comme une Pythie du monde de l’art contemporain.

Accumulant les mèmes, des images banales assorties de commentaires méchamment ironiques, celle qui se présente comme une ex-galeriste de Los Angeles cultive une dérision qui lui assure une audience de 68 000 followers. Elle lui permet d’échanger avec les puissances de la place, dont elle podcast les interviews.

De son ton acéré, elle relève que la pandémie aura seulement poussé chacun dans sa pente. Elle ne s’attend à aucune sérieuse remise en cause, ni des méga-galeries, ni du système des foires.

Un sarcasme qui pousse la profession à abandonner les communications stéréotypées pour en revenir à l’essentiel : la transmission des œuvres d’art. ...

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