Responsable du département de création contemporaine au Centre Pompidou, Christine Macel a participé aux efforts pour garder le contact avec le public confiné. Alors que le calendrier de réouverture est encore flou, elle explicite les impératifs sanitaires et financiers de la révision du programme d’expositions. Et livre cette intuition : « les expositions à chaud en réaction au coronavirus, je n’y crois pas ».
Quels outils de communication ont été efficaces pour prolonger virtuellement la vie des expositions en cours au Centre Pompidou?
Christine Macel : Le site internet du Centre Pompidou était déjà en cours de remaniement au moment du début du confinement. Les services concernés ont accéléré le rythme en mettant en ligne des matériaux existants, comme les visites d'expositions en cours avec les commissaires déjà filmées (Boltanski, Wols) ou des podcasts (Christo, Boltanski). Pour les expositions en cours sans matériel déjà produit, nous avons fait des propositions connexes. Nous avons par exemple, demandé à Jeremy Shaw sa playlist, et l’avons postée sur Deezer, prolongeant ainsi son installation sonore "Phase Shifting Index" qui, avant de devoir fermer, avait été plébiscitée par le public. Il y a eu un renforcement des mises en ligne sur le site, avec de nombreux matériaux préexistants, visites d'expositions, podcasts, portraits d'artistes, colloques et spectacles vivants, etc… Ainsi que des initiatives, à l’instar du cinéma virtuel du musée lancé par le département Film, ou une série « Mon Triptyque de la collection », visible sur notre chaîne YouTube. Le jeu vidéo du Centre Pompidou a également été mis en ligne.
Quels critères président à la sélection des futures expositions ?
Christine Macel : La programmation se fait environ deux ans à l'avance, si bien que la question pour le Président Serges Lasvignes et le directeur du musée Bernard Blistène n'a pas été de programmer de nouvelles expositions mais bien plutôt de s'adapter à cette situation, avec l'ensemble de la conservation et les différents départements du Centre. Tout ceci a été complexe et difficile à mener. Le but a été de préserver au maximum les engagements et les calendriers, car nous sommes dépendants de prêts et de partenaires. Certaines expositions ont été supprimées, d’autres reportées à l'automne et d’autres, encore, reprogrammées à l’horizon d’un ou deux ans. Celles qui venaient juste d'ouvrir ne vont malheureusement pas pouvoir être vues à la réouverture, pour des raisons de calendrier de démontage et montage, qui vont prendre plus de temps que d'habitude. C'est une situation inédite pour les commissaires et les artistes concernés. Le confinement a montré que le prolongement des expositions via notre site internet pérennisaient virtuellement leur existence. C’est clair, ces contenus vont se développer au-delà de l'épidémie. Cela étant dit, il me paraît important d’innover sur les formats et le ton car il est essentiel de susciter de l'émotion, pour faire passer les contenus.
Très personnellement, au terme du confinement, votre rapport à l’art en général a-t-il changé ?
Christine Macel : Mon rapport à l'art n'a pas changé, au bout de deux mois seulement. Ce qui a momentanément changé, c'est mon rapport aux outils de diffusion. L'avantage du confinement est que beaucoup de sources ont été mises en ligne. Par nécessité, j’ai consulté beaucoup plus de sources en ligne, le plus souvent au sujet d'œuvres ou d'artistes que je connaissais déjà puisque ma propre documentation et les ouvrages de la Bibliothèque Kandinsky ne nous étaient plus accessibles. Mais pour l'art vivant, où il s'agit de se confronter à une œuvre, pour en retirer d'abord une impression, et vivre une expérience esthétique et éthique, je pense que c'est beaucoup plus problématique. Il va falloir retrouver un rapport direct à l'œuvre. Les visites d'expositions on line et autres show-room ne m'ont pas convaincue, sauf à titre d'information.
Cette crise a-t-elle va-t-elle susciter d’autres envies d’art, de nouveaux thèmes ou de nouvelles formes d’exposition ?
Christine Macel : Au moment d'une crise, on imagine que l'on va tout changer, cela ravive les désirs de tabula rasa. Je ne pense pas que les choses vont changer radicalement dans un premier temps sur ce plan. Il va d'abord falloir voir si le public sera au rendez-vous : quelles vont être ses pratiques ? Comment le retrouver ? Evidemment, affirmer d'emblée que l'on va se soucier des plus démunis et tenter d'être écologiquement responsable, cela part d'une excellente intention, mais ce n'est pas le cœur des problématiques qui pointent. La réalité est que les pertes financières des musées et institutions, en France et à l'étranger, sont très importantes. C'est à partir de cette double réalité des finances et du public à venir que l'on va pouvoir tirer un premier bilan sur ce qu'il va être possible de mener à bien. Cela nécessitera un soutien exceptionnel de la part de l'Etat pour combler le déficit, mais aussi de pouvoir compter sur des soutiens privés, plus que jamais nécessaires. Avant la crise, un certain nombre de thèmes nous préoccupaient et ils s’imposent aujourd'hui, au regard des effets économiques, sociaux et culturels de la pandémie : le rapport au social et au politique dans l'œuvre d'art, par exemple, qu’explorera l'exposition Global(e) Resistance à l'automne. Le rapport au monde animal fait également partie de futurs projets du Centre, à la suite de l'édition de Mutations Créations dédiée au vivant en 2019.
Etes-vous tentée de traiter de la mort, de la menace écologique, de la globalisation, au prisme du coronavirus ?
Christine Macel : Mon premier désir, dès la réouverture du Centre Pompidou, est de me plonger à nouveau dans l'installation hypnotique de Jeremy Shaw, comme dans un rituel de re-connexion. Pour ma part, j'aime que l'art m'emmène ailleurs, dans le monde de l'artiste. Le monde de cet artiste possède une dimension profondément cathartique. Je ne crois pas aux expositions à chaud en réaction au coronavirus. Il me semble qu'on aura envie de se confronter à autre chose après deux mois où tous les médias nous ont abreuvé de tant de réflexions, des plus triviales au plus philosophiques, sur le fameux "monde d'après". A moyen terme, il faudra également se poser de nombreuses questions en interne sur notre rapport à l'environnement, à l'écologie et à la durabilité - sujets que nous avions déjà abordés.
Actif online depuis presque 10 ans, Christie’s a accéléré la digitalisation de ses ventes et de sa communication. La crise, explique Cécile Verdier, permet d’installer sans délai, en accéléré, les outils pertinents qui seront les standards de demain, et toucher ainsi de nouveaux publics.
L’implantation mondiale de Christie’s a-t-elle aidé Christie’s France à prendre la mesure de l’épidémie, puis, lorsque le confinement a été imposé, à communiquer en interne et en externe ?
Cécile Verdier : Le fait d’être une maison de taille internationale, présente en Asie, nous a permis d’avoir une vision très en amont de la situation et de pouvoir utiliser en France des méthodes déjà mises en place par nos collègues dans nos bureaux en Chine et à Hong Kong.
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En cette période de confinement, quelles sont les actions menées par la Fondation Henri Cartier-Bresson par vous et votre équipe pour poursuivre vos activités ?
François Hébel : Une légère présence sur les réseaux sociaux, sans submerger les lecteurs. Nous utilisons les « Perles des archives » et quelques documents intéressants pour mieux faire connaître Henri Cartier-Bresson avec des textes courts.
En quoi est-ce important pour vous de maintenir le lien avec vos communautés et vos publics ?
FH : C’est le rôle pédagogique de la Fondation, une de ses principales raisons d’être autour de l’œuvre d’Henri Cartier-Bresson et de Martine Franck.
Comment considérez-vous le rôle ...
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En cette période de confinement, quelles sont les actions menées par l’équipe du château d’Auvers-sur-Oise pour poursuivre votre action en tant qu’institution culturelle ?
Delphine Travers : En cette période particulière, où la culture est omniprésente et nous aide lors de notre confinement, nous transposons les expériences à vivre au château d’Auvers de manière virtuelle afin que nos publics puissent continuer à découvrir la richesse et la diversité culturelle du château.
Puisque le public ne peut pas venir au château d’Auvers, c’est donc le château qui vient vers lui.
Lire la suite >>>Bien avant la crise du coronavirus, le compte Instagram @jerrygogosian s’était imposé comme une Pythie du monde de l’art contemporain.
Accumulant les mèmes, des images banales assorties de commentaires méchamment ironiques, celle qui se présente comme une ex-galeriste de Los Angeles cultive une dérision qui lui assure une audience de 68 000 followers. Elle lui permet d’échanger avec les puissances de la place, dont elle podcast les interviews.
De son ton acéré, elle relève que la pandémie aura seulement poussé chacun dans sa pente. Elle ne s’attend à aucune sérieuse remise en cause, ni des méga-galeries, ni du système des foires.
Un sarcasme qui pousse la profession à abandonner les communications stéréotypées pour en revenir à l’essentiel : la transmission des œuvres d’art. ...
Lire la suite >>>Par FRANÇOIS BLANC
Toutes ses contributions >>>
Par RAPHAËL TURCAT
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